DIDIER SICARD ET LA FIN DE VIE

Télérama de cette semaine consacre ses quatre premières pages à Didier Sicard, interviewé par Juliette Bénabent et photographié par Jean-François Robert. Je vous conseille leur lecture, une leçon de vie donnée par ce professeur de médecine. Je connais Didier depuis ma naissance! Il a sept ans de plus que moi mais nous avons vécu sur le même palier du 10, boulevard Raspail pendant mes quatorze premières années! Son père, phlébologue, soignait ma mère. Il a terminé ses études de médecine quand je les ai commencé. Nous  avons fait carrière à l'AP-HP,  y devenant tous deux chefs de service, lui à Cochin en médecine générale, moi à Saint-Antoine en pneumologie. Nous avons partagé le plaisir d'une mission universitaire en Argentine pendant quinze jours. Réflexion, calme et douceur caractérisent à mes yeux ce sage homme. Ces qualités lui ont permis de rester neuf ans à la présidence du Comité consultatif national d'éthique puis d'être chargé en 2012 d'un rapport sur la fin de vie au Président de la République pour tenter d'améliorer l'insuffisante loi Léonetti. Invité de Télérama, il nous dit:

" Les jeunes médecins voudraient guérir les malades mais être médecin c'est aussi être présent devant un être qui va mourir, de le soulager, de le respecter." Combien de fois, j'ai vu des médecins éviter d'entrer dans la chambre d'un mourant.

"Avant la médecine donnait la mort clandestinement de façon assez courante..." Moins hypocrite que d'autres, il reconnait ainsi la nécessité de l'euthanasie que je préfère nommer aide médicale active à mourir.

Il poursuit: "Oui à une loi permettant l'euthanasie, mais à condition qu'elle définisse un cadre rigoureux et qu'elle s'accompagne d'une révolution des soins palliatifs". Oui, oui, oui! Pour moi, le terme euthanasie devrait reprendre le sens premier que lui avait donné sir Francis Bacon: recherche d'une mort paisible. Cette recherche associe l'accompagnement, les soins palliatifs et l'aide médicale à mourir (absence d'acharnement thérapeutique, sédation active ou suicide assisté).

"L'opposition entre euthanasie et soins palliatifs est un contresens; il faut mener de front ces deux combats". Les services de soins palliatifs français refusent encore catégoriquement toute aide médicale active à mourir alors que les belges la pratiquent!

Enfin, de trois livres qu'il nous cite, deux ont profondément marqué ma connaissance de la mort, ma volonté de recherche sur les cancers, mon amour du métier de médecin; "La montagne magique" de Thomas Mann,  "Le pavillon des cancéreux" d'Alexandre Soljenitsyne. Comme cet article de Télérama, ils méritent d'être lus.